AGNES VARDA nous a quittés RIP

AGNES VARDA

Hommage de Franck Riester, ministre de la Culture, à Agnès Varda

Sa fantaisie, son humour, sa poésie, sa tendresse, son goût de l’improvisation laissent le cinéma français orphelin.

Avec un talent insolent, Agnès Varda s’exprimait avec autant de bonheur dans le long ou le court métrage, dans le documentaire ou la fiction, mais aussi, on le sait moins, dans l’art contemporain, avec d’étonnantes installations poétiques, ou dans la photographie, à travers sa collaboration avec l’artiste JR.

La cinéaste de « Cléo de 5 à 7 », du « Bonheur », de « Sans toit ni loi », des « Glaneuses », savait filmer, avec autant de force et d’empathie, le bonheur et le malheur, faire partager sa joie de vivre comme elle savait partager la souffrance de ses prochains.

Cette remarquable cinéaste aura été avant tout une femme capitale.

Avec l’aisance des gens doués, Agnès Varda savait saisir la moindre circonstance, la moindre occasion que donne la vie pour faire un film.

Elle avait commencé sa longue carrière sous les auspices les plus favorables comme photographe du festival d’Avignon, que Jean Vilar venait tout juste de fonder. Son objectif immortalise alors Gérard Philipe et Maria Casarès. Quelques années plus tard, elle tourne son premier long métrage avec deux débutants du TNP : Philippe Noiret et Silvia Monfort. Son monteur s’appelait Alain Resnais. C’était en 1954. Ce premier film, « La pointe Courte », c’était déjà la Nouvelle Vague avant l’heure.

Il faut saluer sa détermination et son talent tout autant que la sensibilité dont Agnès Varda a fait preuve dans son œuvre.

Pléthores sont les thèmes qui ont suscité son regard vif et qui ont appelé de leur nécessité son intervention artistique : ces thèmes ont parlé à nos existences, ils ont parlé de nos vies, de l’absurde et de l’oubli. Ces thèmes nous ont parfois embarrassés, ils nous ont souvent encombrés, mais toujours ils nous auront touchés.

J’adresse à sa famille et à ses proches mes plus sincères condoléances.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Agnès Varda, née Arlette Varda le  à Ixelles(Belgique) et morte le 1, était une photographeréalisatrice de cinéma et plasticienne française.

C’est l’une des rares réalisatrices de la Nouvelle Vague. Elle a notamment réalisé les films La Pointe courte (1955), Cléo de 5 à 7 (1962), Ulysse (1984, César du meilleur court métrage documentaire), Sans toit ni loi (1985Lion d’or à la Mostra de Venise), Jacquot de Nantes (1991), Les Glaneurs et la Glaneuse(2000), Deux ans après (2002), Les Plages d’Agnès (2009, César du meilleur film documentaire) et Visages, villages (2017).

L’ensemble de son œuvre cinématographique est récompensée par un César d’honneur en 2001, par le prix René-Clair de l’Académie française en 2002, par une Palme d’honneur au Festival de Cannes 2015, par un Oscar d’honneur reçu en 20172, et par la Caméra de la Berlinale en 2019.

Biographie[modifier | modifier le code]

Agnès Varda, née le 30 mai 1928 d’un père grec et d’une mère française, fuit la Belgique en 1940 pour s’installer avec sa famille à Sète où elle vit son adolescence.

Venue à Paris, elle étudie la photographie à l’École des beaux-arts et l’histoire de l’art à l’École du LouvreJean Vilar, dont elle connait l’épouse depuis son adolescence sétoise, lui offre un emploi de photographe au TNP (Théâtre national populaire) qu’il dirige alors. De sa liaison avec Antoine Bourseiller naît Rosalie Varda, future costumière de cinéma.

En 1954, avec peu de moyens, elle tourne son premier long métrage de fiction, La Pointe courte joué par Philippe Noiretet Silvia Monfort et monté par Alain Resnais. Ce film fera date. Il apporte un souffle de liberté sur le cinéma français, comme l’écrit la Revue belge du cinéma3 : « Tout le nouveau cinéma est en germe dans La Pointe courte — film d’amateur, tourné en 35 mm, avec des moyens de fortune, hors du circuit économique traditionnel. […] Chronique néo-réaliste d’un village de pêcheurs et dialogue d’un couple qui fait le point. Toutes les caractéristiques de la jeune école du cinéma se trouvent réunies dans La Pointe courte et Alain Resnais, qui en fut le monteur, n’a jamais caché l’influence que ce film a eu sur lui. »

Elle rencontre le réalisateur Jacques Demy, son futur époux, au Festival de Tours en 1958. Ils seront les parents de Mathieu Demy et Jacques Demy adoptera Rosalie Varda4. Dans Les plages d’Agnès, la réalisatrice révèle qu’elle a quatre petits-fils : Valentin, Augustin, Corentin (enfants de Rosalie) et Constantin (fils de Mathieu).

En 1961, elle réalise Cléo de 5 à 7, un film sur une belle chanteuse qui erre dans Paris, se croyant mortellement malade. Puis, avec Les Créatures et Le Bonheur, elle produit d’autres films qui font d’elle, dans les années 1960, l’une des premières représentantes du jeune cinéma français. Aux côtés de la Nouvelle Vague, on parle plutôt, à son sujet, comme de Jacques Demy, de Chris Marker ou d’Alain Resnais, de cinéma de la « Rive gauche », afin de marquer une différence sociologique et politique.

Entre 1968 et 1970, elle séjourne à Los Angeles, où elle réalise un film hippie-hollywoodien, Lions Love, ainsi que plusieurs courts documentaires. De retour en France, elle tourne un film féministe et optimiste : L’une chante, l’autre pas. Elle est l’une des femmes qui signent en 1971 le manifeste des 343 en France.

Puis, repartie à Los Angeles entre 1979 et 1981, elle tourne un documentaire très remarqué sur les peintures murales, Mur murs, et une fiction inspiré de sa vie à Venice Documenteur. Durant son premier voyage, elle fait connaissance de Jim Morrison, chanteur du groupe The Doors ; ce dernier avait par ailleurs obtenu un diplôme en cinématographie à l’UCLA en 1965. Elle fut l’une des rares personnes à l’avoir vu mort chez lui et à avoir assisté à son enterrement au cimetière du Père-Lachaise5.

En 1983, elle est membre du jury des longs métrages du 40e Festival de Venise.

En 1985Sans toit ni loi, mettant en vedette Sandrine Bonnaire, lui vaut le Lion d’or à la Mostra de Venise 1985. En 1987, elle filme les états d’âme de Jane Birkin, qui, venant de franchir la barre des 40 ans, vit de douloureux moments professionnels ; Varda en fait deux films de fiction : Jane B. par Agnès V. et Kung-Fu Master6, aussi connu sous le titre du Petit Amour.

Après la mort de Jacques Demy en 1990, elle lui rend hommage avec trois films : Jacquot de Nantes, une fiction et deux documentaires : Les demoiselles ont eu 25 ans et L’Univers de Jacques Demy.

En 1995, pour le centième anniversaire du cinéma, avec l’appui de plusieurs vedettes, elle crée Les Cent et Une Nuits de Simon Cinéma, une fantaisie faite de clins d’œil et de références au cinéma, mais qui est un échec.

Agnès Varda au Harvard Film Archive en mars 2009.

En 2000Les Glaneurs et la Glaneuse est un autre moment important dans sa carrière. L’utilisation d’une caméra numérique lui permet de réaliser seule ce documentaire qui est bien accueilli par les critiques et le public, et auquel elle donne une suite sous le titre Deux ans après.

En 2005, elle est membre du jury des longs métrages au festival de Cannes 2005 et la Cinémathèque québécoise lui rend hommage avec une rétrospective filmographique et une exposition photographique.

Elle réalise les multiples suppléments pour la sortie du DVD de collection Cléo de 5 à 7 et Daguerréotypes.

En 2006, elle est invitée, « vieille cinéaste, jeune plasticienne », à investir la Fondation Cartier pour l’art contemporain dans une exposition qu’elle intitule L’Île et Elle.

En 2007, en hommage à Jean Vilar, elle expose ses photos au festival d’Avignon.

Dans le long-métrage autobiographique Les Plages d’Agnès, sorti en décembre 2008, elle revient sur sa vie et sur son travail, et obtient le César du meilleur film documentaire lors de la 34e cérémonie des César.

Le , elle reçoit un prix Henri-Langlois d’honneur pour l’ensemble de sa carrière, à l’occasion des Rencontres internationales du cinéma de patrimoine et de films restaurés de Vincennes ; et le , elle devient commandeur de la Légion d’honneur7.

Elle est, depuis le 22 septembre 2010, docteur honoris causa de l’Université de Liège.

Lors du Festival de Cannes 2013, elle est présidente du jury de la Caméra d’or.

Elle est élevée à la dignité de grand-croix de l’ordre national du Mérite en 20138.

Elle a reçu le Léopard d’honneur lors du 67e Festival international du film de Locarno9.

En 2015, la palme d’honneur du festival de Cannes lui est décernée. Elle le reçoit comme un prix de « résistance et d’endurance », dit-elle dans son discours10.

Juste après Cannes, un projet avec le photographe JR (artiste) soulève la polémique. Leur projet au titre évocateur AV et JR deux artistes en goguette va engendrer incompréhension et critiques acerbes. Le projet, porté par des artistes reconnus, fait appel à la générosité publique d’une plateforme de financement participatif KissKissBankBank — type de financement habituellement réservé pour le lancement de nouveaux artistes. Les medias qualifient le projet et sa démarche, au mieux de candide et maladroite, au pire de condescendante et démagogique11,12. Le projet débouche pourtant au final sur le long-métrage documentaire Visages, villages, qui reçoit L’Œil d’or (prix du documentaire) au festival de Cannes 2017 puis, lors de sa sortie en début d’été de la même année, un accueil favorable à la fois critique et spectateurs.

Elle meurt chez elle à l’âge de 90 ans, dans la nuit du 28 mars au 29 mars 2019 des suites d’un cancer13.

Filmographie[modifier | modifier le code]

Longs métrages[modifier | modifier le code]

Documentaires[modifier | modifier le code]

Agnès Varda au festival de Cannes 2011.

Courts métrages[modifier | modifier le code]

Télévision[modifier | modifier le code]

Autres[modifier | modifier le code]

  • 1965 : Christmas Carol : « Dix minutes ont été tournées avec Gérard Depardieu débutant… Ça aurait été un film sur la jeunesse d’avant 68, mais je n’ai pas eu l’avance et le distributeur a renoncé » (propos d’Agnès Varda dans Positifno 253, avril 1982)
  •  : installation au Panthéon de Paris pour la cérémonie de la pose d’une plaque à la mémoire des Justes parmi les nations de France ; deux films inédits sur 4 écrans et quelque 300 portraits de Justes.

Photographie[modifier | modifier le code]

En 1955, Agnès Varda participe au réaménagement intérieur de l’église Saint-Nicolas de Fossé, dans les Ardennes, en réalisant les photographies du chemin de croix et en photographiant l’avancement des travaux conduits par Pierre SzékelyVera Székely et André Borderie. Le chemin de croix a été détruit par des paroissiens rendus furieux par les représentations des artistes15,16.

Arts plastiques[modifier | modifier le code]

« Jeune plasticienne » selon ses propres termes, Agnès Varda propose des cabanes sous forme d’installations.

Distinctions[modifier | modifier le code]

Ces principales distinctions figurent dans la liste des IMDb Awards d’Agnès Varda qui en recense plus de 8020.

Honneurs[modifier | modifier le code]

Empreintes d’Agnès Varda à Cannes

Récompenses[modifier | modifier le code]

Nominations[modifier | modifier le code]

Hommages[modifier | modifier le code]

Traverse Agnès-Varda à Sète-La Pointe courte

Plusieurs lieux portent son nom en France :

Vidéographie[modifier | modifier le code]

  • Tout(e) Varda de Agnès Varda, Arte Vidéo/Ciné-Tamaris, 21 novembre 2012, 22 DVD PAL, toutes zones, mono et stéréo, audio anglais et français, sous-titres sourds et malentendants (durée environ 50 heures) + album 132 pages + 3 surprises (2 DVD et 1 pochette) [présentation en ligne [archive]]Document utilisé pour la rédaction de l’articleIntégrale de ses courts et longs métrages29.

Publications[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1.  https://www.lci.fr/people/mort-de-la-realisatrice-francaise-agnes-varda-a-l-age-de-90-ans-2116880.html [archive]
  2.  « Agnès Varda reçoit un Oscar d’honneur pour l’ensemble de sa carrière » [archive], sur Le Monde.fr(consulté le 5 mars 2018)
  3.  Extraits du no 20 de juillet 1987 comprenant, entre autres, la réédition de l’article de l’écrivain Bernard Pingaud paru dans le no 1 du magazine Artsept créé par l’essayiste Raymond Bellour en 1963.
  4.  Mathilde Blottière, « Les films de Jacques Demy enfin édités en DVD » [archive]Télérama no 3070, 15 novembre 2008.
  5.  Stephen Davis, Jim Morrisonéditions Flammarion, page 453.
  6.  Voir la fiche chez Ciné tamaris [archive].
  7.  « Légion d’honneur : Vincent Bolloré et Max Gallo promus », Le Monde,‎  (lire en ligne [archive])
  8.  Décret du 14 mai 2013 portant élévation aux dignités de grand’croix et de grand officier [archive]
  9. ↑ a et b « Le Pardo d’onore Swisscom 2014 à Agnès Varda » [archive], sur http://www.pardolive.ch/ [archive](consulté le 26 août 2014)
  10. ↑ a et b Article sur le site officiel du festival [archive]
  11.  Emmanuelle Jardonnet, « De JR à Francis Lalanne, quand le recours au crowdfunding passe mal » [archive]Le Monde (consulté le 14 mai 2016)
  12.  Mathieu Deslandes, « Les grandes vacances (à vos frais) de JR et Varda » [archive]Rue89 (consulté le14 mai 2016)
  13.  « La cinéaste Agnès Varda est décédée à l’âge de 90 ans » [archive], sur AFP.comAgence France-Presse (consulté le29 mars 2019)
  14.  Pour écouter en ligne consultez ce site [archive] et sélectionnez le film dans la liste.
  15.  « Fossé : la “guerre des statues” » [archive] (consulté le 26 octobre 2017).
  16.  Marasi Julien, « Eglise paroissiale Saint-Nicolas » [archive], Région Grand-Est,  (consulté le 27 octobre 2017)
  17.  L’Île et Elle, Paris et Arles, Fondation Cartier pour l’art contemporain et Actes Sud, , 92 p. (ISBN 978-2742764242 et978-2742762088)
  18.  Collectif (dir.), Le spectacle du quotidien, the spectacle of the everydayDijon, France, Les Presses du réel, 423 p.(ISBN 978-2-84066-352-2)
  19.  Galerie d’Art du Conseil général des Bouches-du-Rhônerenseignements pratiques [archive]
  20.  Agnès Varda Awards sur l’IMDb [archive]
  21.  Décret du 14 avril 2017 portant élévation et nomination aux dignités de grand’croix et de grand officier [archive].
  22.  Fiafnet.org [archive]
  23.  allocine.fr [archive]
  24.  Beauvais.fr [archive]
  25.  Elsa Mongheal, « L’ouverture du nouveau cinéma de nouveau repoussée » [archive]L’Yonne républicaine(consulté le 30 août 2017)
  26.  « Annuaire : présentation des écoles, collèges, lycées, etc. » [archive], sur education.gouv.fr (consulté le 13 avril 2018)
  27.  ecoledephoto.be [archive]
  28.  « Soirée Agnès Varda | Université Blaise Pascal, Clermont-Ferrand » [archive], sur www.univ-bpclermont.fr (consulté le8 février 2016)
  29.  À l’occasion de la sortie de son intégrale, Agnès Varda est l’invitée de deux émissions de radio de France Culture : par Laurent Goumarre dans Le Rendez-Vous, diffusée le  (durée 50 min), écoute en ligne [archive], et par Michel Cimentdans Projection privée, diffusée le  (durée 61 min), écoute en ligne [archive]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (it) Sara Cortellazzo et Michele Marangi, Agnès Varda, Edizioni di Torino, 1990
  • Michel Estève et al.Agnès Varda, Paris, Lettres modernes Minard, coll. « Etudes cinématographiques » (no 179-186), (ISBN 978-2-256-90894-1OCLC 988546281)
  • Bernard Bastide, Les Cent et une nuits, chronique d’un tournage, Pierre Bordas et fils, 1995
  • (en) Sandy Flitterman-LewisTo desire differently: feminism and the French cinema, Columbia University Press, , 379 p.
  • (en) Alison Smith, Agnès Varda, Manchester University Press, 1998
  • Antony Fiant, Roxane Hamery et Eric Thouvenel (dir.), Agnès Varda : le cinéma et au-delà, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2009, présentation en ligne [archive]

Conférence[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

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