BRAD ELTERMAN
- ParCLARA MOKRI;
- photosBRAD ELTERMAN
Brad Elterman nous a parlé de son temps passé à photographier David Bowie, Joan Jett, Bob Dylan et Kiss.
Il y a 42 ans, Brad Elterman a séché l’école, s’est rendu jusqu’à un studio d’enregistrement de Los Angeles et a attendu David Bowie pour le prendre en photo – avant d’y parvenir. Publiée en double page dans le magazine Creem, cette photo marque le début d’une carrière trépidante qui a changé la photographie dans l’univers du rock’n’roll. En lieu et place des traditionnelles photos sur scène, Brad allait en coulisses et partout où il fallait pour
mmortaliser les légendes des années 1970 dans leur voiture, pendant le déjeuner, devant des toilettes – bref, dans la vie de tous les jours. Près d’un demi-siècle plus tard, Brad (qui est aussi un de nos contributeurs occasionnels) a trouvé plusieurs de ses négatifs en vente sur eBay, les a rachetés et a replongé dans ses souvenirs.
J’ai récemment eu l’occasion de discuter avec lui au téléphone des rois et reines du rock qu’il a côtoyés, des négatifs qu’il a retrouvés et de ce qui lui manque de ces glorieuses années.
VICE : Comment est-ce que ces photos se sont retrouvées sur eBay ?
Brad Elterman : Dans les années 1970, quand j’étais super prolifique avec mon appareil photo, j’envoyais par la poste mes diapositives en couleurs et mes photos en noir et blanc à des magazines un peu partout dans le monde. Je conservais mes négatifs noir et blanc.
Il y a quelques années, j’étais à Tokyo et je suis allé à Shinko Music, qui publiait les magazines Music Life et Rock Show. Ils avaient publié tout ce que je leur avais envoyé, et j’étais devenu leur correspondant à Los Angeles. Quand je suis arrivé, il n’y avait personne, sauf un vieux garde de sécurité qui m’a dit que tout le monde était parti il y a des années et qu’il n’avait aucune idée d’où étaient passées les archives. Ce n’était pas un cas unique. Toutes les publications auxquelles j’avais envoyé mes photos dans les années 1970 ont fermé boutique, et leurs archives ont disparu. Des milliers de photos ont été jetées et se sont retrouvées entre les mains de personnes qui ont fouillé ces poubelles.
Je voulais photographier tout ce qui était nouveau : tous les jeunes groupes cool dont on parlait dans les publications britanniques comme Sounds, NME etMelody Maker. Un jour, Steve Jones des Sex Pistols est venu chez moi se baigner, et j’ai pris des photos. À mes débuts, je rêvais de prendre des photos de Bob Dylan. Le fait qu’il ne sorte pas et qu’il ne veuille pas être pris en photo ne faisait que me motiver encore plus. L’apothéose de ma carrière, c’est le soir où j’ai rencontré Bob et qu’il m’a demandé de prendre une photo de lui et de Robert De Niro dans les coulisses du Roxy en 1976.
Quelles photos se démarquent en particulier selon toi ?
Toutes celles de Joan Jett. Elle était ma plus grande muse. Elle était si charismatique et stupéfiante. On était tous les deux plutôt timides, et elle m’a donné une certaine confiance pour réaliser ces portraits.
Quelles émotions te provoquent ces photos 40 ans plus tard ?
C’est plein d’émotions pour moi. J’étais adolescent quand j’ai pris ces photos, et aujourd’hui j’ai 60 ans. Elles font remonter des souvenirs de ma jeunesse. Certaines des personnes que j’ai photographiées ne sont plus des nôtres. Mes vieilles photos m’aident à trouver l’inspiration. Je suis en train d’écrire un film sur ce que c’était de prendre des photos dans les années 1970. Quand je regarde certaines des photos, des souvenirs me reviennent et je me dis : « Oh! Je pourrais ajouter ça dans le scénario. »
En quoi Los Angeles a-t-elle changé depuis les années 1970 ? Est-ce que certaines choses sont restées les mêmes ?
Certains édifices sont toujours là. Enfin, Los Angeles est une ville de premier plan. Les rêveurs sont toujours ici, mais ils vont et viennent. Il y a peu d’endroits où je sortais qui existent encore. Le Whiskey et le Roxy sont toujours là ; le Rainbow Bar and Grill aussi. Ces bars sont restés les mêmes, mais il n’y plus aucun de mes amis. Quand j’y allais, j’étais le plus jeune, et je connaissais tout le monde. Maintenant, c’est le contraire. Peut-être que je suis un peu blasé après la
vie folle que je menais à l’époque. Il m’en faut beaucoup aujourd’hui pour que je sorte voir un concert, mais je ne vis pas complètement comme un ermite. Je suis allé photographier Sunflower Bean dernièrement, et c’était surréaliste de se trouver en coulisses avec eux. C’était dans cette même loge que j’avais photographié Bob Dylan et Robert De Niro 40 ans plus tôt.
En quoi ton style et ton approche ont-ils changé ?
Ça n’a pas changé du tout. La plupart des rédacteurs en chef me disent de ne rien changer et de photographier comme je le faisais en 1977 avec Joan Jett.
Peter Frampton et son tour manager, Mr Tiny, à la sortie des toilettes lors d’un concert au Anaheim Stadium, 1978.
Joan Jett et Danny Wilde de Quick en coulisses au Whiskey a Go Go, 1977.
Debbie Harry de Blondie en coulisses au Whiskey a Go Go, 1977.
Pete Townsend des Who lors d’une fête d’après-concert au Flippers à West Hollywood, 1978