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Henning Mankell

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Henning Mankell, né le à Stockholm et décédé le 4 octobre 2015, est un romancier et dramaturge suédois, tout particulièrement connu comme auteur d’une série policière ayant pour héros l’inspecteur Kurt Wallander du commissariat d’Ystad, une ville de Scanie, près de Malmö, dans le sud de la Suède. Mankell a également publié des ouvrages de littérature d’enfance et de jeunesse.

Biographie[modifier | modifier le code]

Jeunesse et débuts[modifier | modifier le code]

Henning Mankell grandit à Härjedalen, au centre de la Suède. Ses parents ont divorcé alors qu’il avait un an1. Sa mère partie, il est élevé par son père, juge d’instance2. A seize ans, il part en stop pour Paris2. Il intègre ensuite la marine marchande, vit à Paris puis en Norvège1. En 1972, il découvre l’Afrique, d’abord en Guinée-Bissau puis en Zambie1.

Il partage ensuite sa vie entre la Suède et le Mozambique où il a monté une troupe de théâtre, le « Teatro Avenida ». Après quelques romans, il développe sa carrière d’écrivain pour « se consacrer au théâtre en signant de nombreuses pièces »3 pour la scène et pour la radio. Dès 1990, il se lance en parallèle dans l’écriture d’ouvrages de littérature d’enfance et de jeunesse. Selon le spécialiste des littératures nordiques Philippe Bouquet cité par Claude Mesplède dans leDictionnaire des littératures policières : « Mankell a toujours eu un faible pour les petites gens, […] cela se remarque dès ses premières œuvres romanesques [dans les années 1980 centrés sur des ouvriers] qui se lancent à la poursuite d’un patron indélicat [ou] traitent de la situation de la femme par le biais de la maternité »3.

Wallander et le succès[modifier | modifier le code]

Mankell en 2011

Mankell ne connaît toutefois une renommée internationale que grâce à la série policière des enquêtes de Kurt Wallander, homme en « perpétuelle interrogation sur le pourquoi des souffrances humaines [et dont la devise est] : “Les êtres sont rarement ce qu’on croit qu’ils sont” »4. Ce commissaire, qui mène ses enquêtes de façon désabusée, est entouré par une équipe de policiers où chacun possède une personnalité soigneusement décrite. Les meurtres sanglants auxquels il est confronté le plongent au fil des romans dans un état de plus en plus dépressif, car le développement de l’aspect psychologique est tout aussi important pour Mankell que l’intrigue policière elle-même. Toutes les aventures de Wallander se déroulent dans la petite ville d’Ystad, en Scanie, dans le sud de la Suède, même si le détective se déplace une fois en Lettonie(Les Chiens de Riga) et enquête sur un meurtre dont les origines remontent en Afrique du Sud (La Lionne blanche). En outre, le sol du proche Danemark est souvent foulé.

Henning Mankell reçoit le Prix Nils Holgersson en 1991. Il devient le premier lauréat du Prix Clé de verre en 1992 avec le roman Meurtriers sans visage. En 2000, il reçoit lePrix Mystère de la critique pour le roman Le Guerrier solitaire. Mankell est également double lauréat du Prix du meilleur roman policier suédois.

En 2007, il préside le jury du Prix du Livre européen qui sera remis cette année-là à Guy Verhofstadt pour son livre Les États-Unis d’Europe.

En 2010, il participe à l’expédition organisée par des groupes activistes en faveur de Gaza, qui donne lieu à un abordage israélien qui causa une dizaine de victimes. Il tire de cette expérience un récit publié le dans plusieurs grands journaux dont Libération (France) 5, The Guardian6 (Angleterre), El País (Espagne), Dagbladet (Suède),La Repubblica (Italie) ou The Toronto Star (Canada). En janvier 2010, le classement de plusieurs magazines dédiés à l’édition, dont Livres-Hebdo en France et The Bookseller (en) en Grande-Bretagne, le place à la neuvième place des écrivains de fiction les plus vendus en Europe en 20097.

Le 29 janvier 2014, il révèle publiquement qu’il est touché par un cancer détecté au cou et dans un poumon à un stade avancé8. Et il précise « J’ai tout de suite décidé d’écrire à propos de cette maladie, parce que c’est finalement une douleur et une souffrance qui affectent beaucoup de gens. Mais je vais écrire avec la perspective de la vie, pas de la mort. »

Vie privée[modifier | modifier le code]

Il est le gendre d’Ingmar Bergman dont il a épousé la fille Eva, chorégraphe et directrice de théâtre9,2,1.

Travaux et style[modifier | modifier le code]

Son œuvre policière est généralement considérée comme un prolongement de la saga, écrite entre 1965 et 1975 par le couple Maj Sjöwall et Per Wahlöö, du personnage de Martin Beck, puisque Wallander rencontre lui aussi « quelques problèmes familiaux et porte un regard critique sur les pouvoirs en place de son pays »3.

Certaines œuvres de Mankell ont des liens ou des développements inattendues. La Faille souterraine et autres enquêtes est un recueil de cinq nouvelles qui se déroulent avant Meurtriers sans visage, à savoir entre juin 1969 (la première enquête de Kurt Wallander lorsqu’il a 21 ans) et janvier 1990. Mankell, à la demande de ses lecteurs, s’est fait un plaisir d’aborder la genèse du héros et ses comportements. Avant le gel(traduction littérale du titre original) opère un transfert des enquêtes entre Kurt Wallander et sa fille, Linda. En effet, d’une part, Kurt Wallander approche rapidement de la retraite et, d’autre part, Linda s’est enfin décidée pour une carrière, dans la police, et à Ystad.

Le Retour du professeur de danse (Danslärarens återkomst, 2000), un polar a priori hors du cycle de Wallender, s’avère cependant très « wallanderien », puisque le personnage central, un inspecteur de police nommé Stefan Lindman croise l’univers du héros fétiche de Mankell. En effet, Stefan Lindman obtient une mutation pour le commissariat d’Ystad dans Avant le gel et une histoire d’amour s’amorce alors entre Linda Wallander et Stefan Lindman. Le Retour du professeur de danse a été adapté au cinéma en 2004 (Die Rückkehr des Tanzlehrers (de)).

La popularité du héros de Mankell est telle que le commissariat d’Ystad est devenu une attraction touristique, et reçoit la visite de touristes demandant à voir Kurt Wallander.

Œuvre[modifier | modifier le code]

Il existe une catégorie consacrée à ce sujet : Œuvre d’Henning Mankell.

Romans et nouvelles policiers[modifier | modifier le code]

Série Kurt Wallander (par ordre chronologique de la fiction)[modifier | modifier le code]

  1. La Faille souterraine et autres enquêtes ((sv) Pyramiden, 1999), trad. Anna Gibson (édition française 2012)10
    Recueil de cinq nouvelles policières, dont l’action se situe avant celles des onze romans de la série
  2. Meurtriers sans visage ((sv) Mördare utan ansikte, 1991), trad. Philippe Bouquet (édition française 1994)
  3. Les Chiens de Riga ((sv) Hundarna i Riga, 1992), trad. Anna Gibson (édition française 2003)
  4. La Lionne blanche ((sv) Den vita lejoninnan, 1993), trad. Anna Gibson (édition française 2004)
  5. L’Homme qui souriait ((sv) Mannen som log, 1994), trad. Anna Gibson (édition française 2005)
  6. Le Guerrier solitaire ((sv) Villospår, 1995), trad. Christofer Bjurström (édition française 1999) Prix Mystère de la critique 2000
  7. La Cinquième Femme ((sv) Den femte kvinnan, 1996), trad. Anna Gibson (édition française 2000)
  8. Les Morts de la Saint-Jean ((sv) Steget efter, 1997), trad. Anna Gibson (édition française 2001)
  9. La Muraille invisible ((sv) Brandvägg, 1998), trad. Anna Gibson (édition française 2002)
  10. Avant le gel ((sv) Innan frosten, 2002), trad. Anna Gibson (édition française 2005)
  11. Une main encombrante ((sv) Handen, 2013), trad. Anna Gibson (édition française 2014 ; publié après L’Homme inquiet, mais l’intrigue le précède)
  12. L’Homme inquiet ((sv) Den orolige mannen, 2009), trad. Anna Gibson (édition française 2010)11

Autres romans policiers[modifier | modifier le code]

  • Le Retour du professeur de danse ((sv) Danslärarens återkommst, 2000), trad. Anna Gibson (édition française 2006)12
  • Le Chinois (en), Seuil ((sv) Kinesen, 2008), trad. Rémy Cassaigne (édition française 2011)13,14

Autres romans[modifier | modifier le code]

  • Vettvillingen (1977)
  • Fångvårdskolonin som försvann (1979)
  • Dödsbrickan (1980)
  • En seglares död (1981)
  • L’Œil du léopard, Éditions du Seuil, 2012 ((sv) Leopardens öga, 1990), trad. Agneta Ségol et Marianne Ségol-Samoy
  • Comédia infantil ((sv) Comédia infantil, 1995), trad. Agneta Ségol et Pascale Brick-Aïda (édition française 2003)
  • Le Fils du vent ((sv) Vindens son, 2000), trad. Agneta Ségol et Pascale Brick-Aïda (édition française 2004)
  • Tea-Bag ((sv) Tea-Bag, 2001), trad. Anna Gibson (édition française 2007)
  • Profondeurs, Éditions du Seuil ((sv) Djup, 2004), trad. Rémi Cassaigne (édition française 2008)
  • Le Cerveau de Kennedy ((sv) Kennedys hjärna, 2005), trad. Rémi Cassaigne (édition française 2005)
  • Les Chaussures italiennes ((sv) Italienska skor, 2006), trad. Anna Gibson (édition française 2009)
  • Un paradis trompeur ((sv) Minnet av en smutsig ängel, 2012), trad. Rémy Cassaigne (édition française 2013)
  • Daisy Sisters ((sv) Daisy Sisters, 1982), trad. Rémy Cassaigne (édition française 2015)

Ouvrages de littérature d’enfance et de jeunesse[modifier | modifier le code]

  • La Société secrète ((sv) Hunden som sprang mot en stjärna, 1990), trad. Agneta Ségol (édition française 1999).
  • Le Chat qui aimait la pluie ((sv) Katten som älskade regn, 1992), trad. Agneta Ségol (édition française 2000).
  • Le Secret du feu ((sv) Eldens hemlighet, 1995), trad. Agneta Ségol (édition française 1999).
  • Le Mystère du feu ((sv) Eldens gåta, 2001), trad. Agneta Ségol (édition française 2003).
  • Le Roman de Sofia, 2011, trad. Agneta Ségol et Marianne Segol-Samoy. Cet ouvrage regroupe les deux romans précédents, le Secret du feu et le Mystère du feu, et propose un troisième roman inédit, la Colère du feu, avec la même héroïne.
  • Les ombres grandissent au crépuscule ((sv) Skuggorna växer i skymningen, 1991) (édition française 2012).

Théâtre[modifier | modifier le code]

Henning Mankell a une autre passion, le théâtre. À dix-sept ans, il écrit déjà des pièces de théâtre et travaille comme assistant à la mise en scène, à vingt ans, il obtient la direction d’une scène en Scanie. En outre, depuis 1996, il dirige à Maputo au Mozambique (où il vit « en alternance » depuis 1985) le Teatro Avenida, seule troupe de théâtre professionnelle du pays, pour laquelle il écrit et met en scène — et où il travaille gratuitement. Ce serait d’ailleurs lors d’un de ses retours en Suède qu’il fut frappé par les changements au pays, les pertes de repères, de solidarité qui caractérisaient le pays natal. Plus présente, la violence l’inquiète et l’auteur s’inspire d’un fait réel pour écrire Meurtriers sans visage.

  • Apelsinträdet (1983)
  • Älskade syster (1983)
  • Den samvetslöse mördaren Hasse Karlsson (1989)
    Publié en français sous le titre L’assassin sans scrupules, Hasse Karlsson, dévoile la terrible vérité : comment la femme est morte de froid sur le pont de chemin de fer, traduit par Terje Sinding, L’Arche Editeur, 2003
  • Antiloperna (1989)
    Publié en français sous le titre Antilopes, traduit par Gabrielle Rozsaffy et Bernard Chartreux, L’Arche, 2006 ; pièce produite en 2006, mise en scène Jean-Pierre Vincent
  • Tokfursten (1989)
  • Grävskopan (1990)
  • Kakelugnen på myren (1992)
  • Berättelser på tidens strand (1997)
  • Hårbandet (1997)
  • And the Sand Calls Out (1997)
  • Mannen som byggde kojor (1998)
  • Påläggskalven (1999)
  • Att storma himlen (1999)
  • Innan gryningen (1999)
  • Svarte Petter (2001)
  • Mörkertid (2001)
    Publié en français sous le titre Ténèbres, traduit par Terje Sinding, L’Arche Editeur, 2006 ; pièce produite en 2007, mise en scène de Brigitte Jaques-Wajeman
  • Butterfly Blues (2002)
  • Valpen (2003)
    Publié en français sous le titre Jeune chien fou, traduit par Gabrielle Rozsaffy
  • Teabag (2003)
  • En gammal man som dansar (2003)
  • Lampedusa (2006)
  • Tyckte jag hörde hundar (2008)
  • En höstkväll innan tystnaden (2008)
  • Dagar och nätter I Chartres (2008)
    Publié en français sous le titre Des jours et des nuits à Chartres, traduit par Terje Sinding, L’Arche Editeur, 2011 ; pièce produite en 2010, mise en scène de Daniel Benoin.
  • Darwins kapten (2009)
  • Driving Miles (2010)
    Publié en français sous le titre Miles ou Le Coucou de Montreux, traduit par Camilla Bouchet, L’Arche Editeur, 2011

Prix et distinctions notables[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a, b, c et d Andrew Anthony, « Henning Mankell – Du polar à la chronique intime », Courrier International (traduction depuis The Observer),‎
  2. a, b et c Brigitte Salino, « Henning Mankell : “Pour les lecteurs, Wallander est vivant !” », Le Monde des Livres,‎
  3. a, b et c Claude Mesplède, Dictionnaire des littératures policières, p. 291.
  4. Jean Tulard, Dictionnaire du roman policier, p. 471.
  5. Henning Mankell : récit de l’écrivain embarqué, Libération [archive]
  6. Author Henning Mankell aboard Gaza flotilla stormed by Israeli troops sur The Guardian [archive]
  7. Larsson, Meyer and Brown were Europe’s top authors in 2009 [archive], 25 janvier 2010, The Bookseller (en)
  8. « L’écrivain à succès Henning Mankell révèle son cancer », Le Monde,‎ (lire en ligne [archive])
  9. gendre d’Ingmar Bergman [archive]
  10. www.inspector-wallander.org/mysteries/pyramid/ [archive]
  11. www.inspector-wallander.org/mysteries/troubled-man/ [archive]
  12. www.inspector-wallander.org/mysteries/return-of-the-dancing-master/ [archive]
  13. www.inspector-wallander.org/mysteries/man-from-beijing/ [archive]
  14. (se)présentation du livre sur le site d’une librairie suédoise [archive]

Sources[modifier | modifier le code]

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Pierre Grimaud, Henning Mankell et la série policière sur Kurt Wallander : Quelle est sa critique de la société suédoise ?, Paris, Pierre Grimaud,‎ , 93 p. (lire en ligne)
    Mémoire de maîtrise de suédois de l’université de la Sorbonne Paris IV. L’auteur a rédigé son mémoire à une époque où la série Wallander ne comportait que neuf volumes y compris le recueil de nouvelles Pyramiden, mais ne s’est basé que sur les romans Le Guerrier solitaire, La Cinquième Femme, Les Morts de la Saint-Jean et La Muraille invisible pour appuyer son mémoire.

Liens externes[modifier | modifier le code]

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