Suzy Delair nous a quittés RIP

Suzy Delair

Suzanne Pierrette Delaire dite Suzy Delair, née le  à Paris (18e)2, et morte le 3, est une actrice et chanteuse française.

Son répertoire s’étend de la comédie au drameDanseuse, chanteuse, ses interprétations dans le film Quai des Orfèvres, des chansons Avec son tralala et Danse avec moi, de Francis Lopez, sont restées dans les mémoires4. À la scène, elle a joué fréquemment dans des opérettes de Jacques Offenbach (La PéricholeLa Vie parisienne), d’Oscar Straus (Trois valses5), de VanlooDuval et André Messager (Véronique), etc.

Avec sa disparition et celles de Gisèle Casadesus et de Danielle Darrieux, l’actrice française la plus âgée et centenaire encore en vie est Renée Simonot.

Biographie[modifier | modifier le code]

Fille d’une couturière et d’un sellier-carrossier, Suzy Delair est d’abord apprentie-modiste chez Suzanne Talbot, mais rêve de théâtre. Elle commence par faire de la figuration au cinéma et au théâtre pendant son adolescence, mais c’est au music-hall qu’elle connaît le succès sur la scène des Bouffes-Parisiens, à Bobino, à l’Européen, aux Folies-Belleville, dans le cabaret de Suzy Solidor, ainsi que dans des revues où se produisent Mistinguett et Marie Dubas4.

Les amateurs de cinéma la découvrent, dix ans plus tard, en Parisienne délurée dans Le Dernier des six (1941), réalisé par Georges Lacombe sur un scénario de Henri-Georges Clouzot, avec qui elle vit. Ce dernier, passé derrière la caméra, lui offre en 1942 un succès considérable avec L’assassin habite au 216.

Sa carrière est entachée par son attitude trouble sous l’Occupation. Elle « ne dissimulait pas ses sympathies pour les Allemands7 », jusqu’à admirer l’ordre nazi8. Sous contrat avec la Continental, dirigée par Alfred Greven, elle fait partie du groupe d’acteurs invités par les Allemands pour visiter les studios cinématographiques de la UFA, en Allemagne et en Autriche (à MunichBerlin et Vienne), aux côtés de René DaryJunie AstorDanielle DarrieuxAlbert Préjean et Viviane Romance9,4,10,11. À son retour, elle choque en embrassant chaleureusement Alfred Greven tout en se plaignant de ne pas avoir serré la main de Joseph Goebbels12. Lorsque l’historien Marc Ferro évoque, dans son livre Pétain (1987), le cinéma pendant cette période, il cite, parmi d’autres, le nom de Suzy Delair13. À la Libération, elle n’écope finalement que d’une suspension de trois mois infligée par les comités d’épuration14.

Si la comédienne figure parmi les vedettes des années 1940, sa carrière cinématographique est émaillée de pauses. En 1947, elle tourne Quai des Orfèvres avec Clouzot, dont elle est encore la compagne ; ils se séparent après ce dernier succès commun4. On la retrouve ensuite dans des films de Jean DrévilleJean GrémillonMarcel L’HerbierChristian-JaqueMarcel CarnéLuchino ViscontiRené Clément et Gérard Oury4.

Le 28 février 1948, elle chante C’est si bon à l’Hôtel Negresco lors du premier Nice Jazz FestivalLouis Armstrong est présent et adore la chanson. Le 26 juin 1950, il enregistre la version américaine de la chanson (paroles anglaise de Jerry Seelen) à New York avec l’orchestre de Sy Oliver. À sa sortie, le disque connaît un succès mondial et la chanson est ensuite reprise par les plus grands chanteurs internationaux15. En 1948 également, elle tourne avec Bourvil dans Par la fenêtre de Gilles Grangier, film oublié aujourd’hui, mais où les deux partenaires font preuve d’une belle complicité.

En 1950-1951, elle tourne Atoll K, réalisé par Léo Joannon, avec pour partenaires Laurel et Hardy, dont c’est le dernier film4. Pendant la saison 1953-1954, elle est à l’Européen, à Paris, dans l’opérette Mobylette, avec pour partenaires Mona Monick et les débutants Michel RouxRoger Lanzac, et Lucien Lupi.

En 1960, dans Rocco et ses frères de Luchino Visconti, elle tient un rôle secondaire mais drôle et remarqué (Luisa, la patronne de la blanchisserie, qui succombe rapidement aux charmes de Simone Parondi / Renato Salvatori).

En 1973 sort le film Les Aventures de Rabbi Jacob de Gérard Oury ; elle y tient le rôle de Germaine Pivert, dentiste épouse de Victor Pivert, incarné par Louis de Funès4. Le film se classe en tête du box-office cette année-là avec plus de 7 millions de spectateurs en salles. Elle remplaçait à titre exceptionnel Claude Gensac, qui avait alors des problèmes de santé.[réf. nécessaire]

En 1982, elle commente son parcours ainsi :

« On me fait trop rarement travailler. Sans doute me fait-on payer à la fois de ne pas appartenir à des chapelles, les aventures masculines auxquelles j’ai parfois sacrifié ma carrière, et surtout, mon refus de flirter quand il aurait fallu le faire4… »

Suzy Delair meurt le , à l’âge de 102 ans3.

Décorations[modifier | modifier le code]

Reconnaissance et hommages[modifier | modifier le code]

Le 24 avril 2004, l’Académie du disque lyrique, présidée par Pierre Bergé, lui remet l’Orphée d’or du meilleur enregistrement d’opérette ou d’opéra bouffe pour son disque De l’opérette à la chanson (Musidisc, 2003).

Le 6 décembre 2004, un hommage lui est consacré à la Cinémathèque française à Paris4, présenté par le journaliste Olivier Barrot, en présence de l’actrice et de ses amis Françoise ArnoulPierre Trabaud, et Jacqueline Willemetz, petite-fille d’Albert Willemetz. Organisée par Sylvain Briet et Les Amis de la Cinémathèque française, cette manifestation présente un cycle de ses films comprenant Quai des OrfèvresLady PanamePattes blanchesGervaiseLe Couturier de ces dames, et le sketch Une couronne mortuaire extrait de Souvenirs perdus.

Filmographie[modifier | modifier le code]

Cinéma[modifier | modifier le code]

Télévision[modifier | modifier le code]

Théâtre[modifier | modifier le code]

Chansons interprétées[modifier | modifier le code]

On peut citer aussi : Je reconnais mon rêveC’est toutMa blondeC’est un air populaire (paroles et musique de Michel Emer), Moi j’coûte cher (de Roger Lucchesi) et Moulin rouge (1966).

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1.  « Acte de naissance de Suzanne Pierrette Delaire. Née le 31 décembre 1917 » [archive], sur CinéArtistes (consulté le 30 décembre 2017)
  2.  Acte de naissance no 11 (vue 3/31). [archive] Archives en ligne de la ville de Paris, état-civil du 18e arrondissement, registre des naissances de 1918.
  3. ↑ Revenir plus haut en :a et b Benoît Duteurtre, « Suzy Delair, la doyenne des comédiennes, est morte » [archive], sur lepoint.frLe Point (consulté le 16 mars 2020).
  4. ↑ Revenir plus haut en :a b c d e f g h et i Jean-Noël Mirande, « Suzy Delair ou L’air de Paris » [archive], sur lepoint.frLe Point (consulté le 1er septembre 2012).
  5.  Reprise en 1959 à la Gaîté-Lyrique à Paris.
  6.  Jean-Noël Mirande, « Suzy Delair ou L’air de Paris », Le Pointop. cit. : « Sans être mariés, ils vécurent ensemble durant plusieurs années. Lorsque Clouzot deviendra réalisateur, il lui donnera de nouveau le personnage de Mila-Malou dans L’assassin habite au 21 (1942). »
  7.  Pierre BillardL’Âge classique du cinéma français : du cinéma parlant à la Nouvelle VagueFlammarion, 1995, 725 p. (ISBN 2080661388 et 978-2080661388)p. 433.
  8.  Pierre DarmonLe Monde du cinéma sous l’Occupation, Paris, Stock, coll. « Essais Documents », 1997, 388 p. (ISBN 978-2234047228)p. 293.
  9.  Raphaël Sorin, « Sous la botte, le cinéma français » [archive], sur lexpress.frL’Express (consulté le 24 février 2013).
  10.  Jean-Noël Mirande, « Suzy Delair ou l’air de Paris », Le Pointop. cit. : « Les images de ces actrices tout sourire à la fenêtre du compartiment passent toujours en boucle, entrées dans l’histoire grâce au film d’André HalimiChantons sous l’Occupation (1976). »
  11.  « Sous le signe de l’art, des vedettes de l’écran s’apprêtent à partir pour l’Allemagne » [archive]Les Actualités mondiales, 27 mars 1942, (à partir de 1 min 38 sIna.
  12.  Pierre Darmon, Le Monde du cinéma sous l’Occupationop. cit.p. 302.
  13.  Marc FerroPétain, Paris, Fayard (réimpr. 2008), 789 p. (ISBN 978-2-213-01833-1), « chap. II : Le grand jeu – Double jeu ou collaboration ? – Pour le cinéma aussi, ce fut le bon temps… », p. 173 : « Désormais les chanteurs et les comédiens partent en Allemagne se faire applaudir […]. On voit encore sur les photographies de l’époque leurs visages radieux […]. »
  14.  Le Spectacle du Monde, Paris, Valmonde (no 304 à 309),  (lire en ligne [archive])p. 85.
  15.  Jean Buzelin, « Delair, Suzy » [archive], sur fremeaux.com, Frémeaux & Associés (consulté le 29 novembre 2012).
  16.  Décret du 15 novembre 1999 portant promotion et nomination [archive].
  17.  Décret du 13 juillet 2006 portant promotion et nomination [archive].
  18.  Archives des nominations et promotions dans l’ordre des Arts et des Lettres. [archive]
  19.  Mobilette, affiche [archive].
  20.  Mobilette [archive] sur data.bnf.fr.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Dictionnaire du cinéma français, sous la direction de Jean-Loup Passek, assisté de Michel CimentClaude-Michel Cluny, Jean-Pierre Frouard, coll. « Références », Paris, Larousse, 1987.
  • Jean-Pierre Bertin-Maghit :
  • José-Louis Bocquet, en collaboration avec Marc Godin, Henri-Georges Clouzot cinéaste, Sèvres, La Sirène, 1993 ; réédité en 2011 sous le titre Clouzot cinéaste, Paris, La Table ronde.
  • Almanach du cinéma : édition du centenaire, sous la direction de Philippe d’Hugues, Paris, Encyclopædia Universalis, 1995.
  • René ChateauLe Cinéma français sous l’Occupation : 1940-1944, Courbevoie, Éditions René Chateau, 1996.
  • Pierre DarmonLe Monde du cinéma sous l’Occupation, Paris, Stock, coll. « Essais Documents », 1997, 388 p. (ISBN 978-2234047228).
  • Olivier Barrot et Raymond ChiratNoir & blanc : 250 acteurs du cinéma français, 1930-1960, Paris, Flammarion, 2000 ; réédité en 2010 sous le titre Ciné-club : portraits, carrières et destins de 250 acteurs du cinéma français, 1930-1960.

Liens externes[modifier | modifier le code]

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